07/09/2009

Rapport d'un stageaire sur le Vetiver au Pépinières Naac Baal - Senegal


Je m’appelle Méïssa Alao-Fary et je suis titulaire d’un BTS en agriculture tropicale. Je m’intéresse aux technologies végétales, celles qui ont pour but de contribuer à la protection l’environnement, à la préservation de l’humus, à la conservation de l’eau etc. particulièrement en milieu aride. C’est dans ce cadre que j’ai décidé de venir au Sénégal pour faire un stage dans les pépinières Naac Baal de Sébikotane.

Ce qui m’y a conduit était principalement le vétiver qui semblait cumuler un grand nombre de qualités écologiques, je voulais les éprouver de mes propres yeux car je n’en avais qu’une connaissance théorique.
Le vétiver est à la fois planté en plein champs entre les rangs d’arbres fruitiers (principalement des manguiers, des agrumes et des papayers) produits biologiquement, mais un endroit est aussi réservé pour la production de plants destinés à la vente. C’est sur l’application agricole du vétiver que je me suis penché, le but étant de voir concrètement les avantages qu’il procure dans un verger. Les avantages du vétiver concernent la protection du sol contre l’érosion, la conservation de l’eau et enfin la création de biomasse. Elle présente l’avantage d’être une plante très rustique, avec une habilité à croître dans des conditions extrêmes.

En effet même dans le contexte de sécheresse de la région, le vétiver n’est arrosé que durant les tout premiers mois de son établissement. Passé ce temps il aura développé un système racinaire assez puissant pour assurer sa propre viabilité et il se passera d’eau durant plus de neuf mois jusqu’aux prochaines pluies. Il s’établit mieux à l’ombrage des arbres mais sa croissance serait moins bonne après coup.

Le vétiver subit de gros dégâts en saison sèche à cause des termites, cependant la saison des pluies constitue une trêve, car celles-ci ne peuvent plus« construire » à cause de l’eau qui détruit leurs ouvrages. Les attaques sont considérables mais elles ne menacent que les pousses récemment plantées, celles qui sont déjà établis ne voit que leur croissance ralentie. Les termites sont les seules ravageurs répertoriés dans le verger.

L’érosion dans les pays sahéliens est un problème majeur, responsable de l’appauvrissement du sol. En effet moins le couvert végétal est fourni plus le sol est exposé à l’érosion hydrique et éolienne. Les mesures de protection sont rares au Sénégal ; les sols restent quasiment à nu pendant toute la saison sèche, ce qui les rend sujets à l’érosion éolienne. Par ailleurs au moment de la saison des pluies, en l’absence de protection le ruissellement a un effet dévastateur, il dépouille le sol de sa riche couche superficielle. Le vétiver offre l’avantage de faire office de barrière anti-ruissellement, il est planté dans le verger en haies très denses à intervalle de 3-4 mètres en alternance avec les rangs d’arbres fruitiers. L’eau de pluie, au lieu de s’écouler d’un trait vers le bas de pente, est ralentie par les haies, les particules de terre qu’elle charrie sont stoppées au pied de celles-ci. De même en ce qui concerne l’érosion éolienne, le vétiver étant une plante pérenne, son action s’étend sur toute l’année, les seuls brise-vents présents à Sébikotane sont les arbres qui délimitent les parcelles, les haies de vétiver offrent une protection adéquate par leur présence à l’intérieur du champs.

Il est frappant de voir un champ avec aussi peu d’espace vide en saison sèche alors que la plupart des champs que l’on rencontre dans les environs sont à nus et ne seront occupés qu’à la saison des pluies.

Le vétiver contribue à la conservation de l’humidité par les mêmes mécanismes que pour l’érosion. Les brise-vents ont la propriété d’atténuer l’évaporation de l’eau en agissant sur la vélocité du vent. Le dense système racinaire du vétiver permet aussi de retenir les eaux de pluies, et de les rendre disponibles pour les plantes cultivées en encourageant l’infiltration en profondeur.

En plus de ces avantages écologiques, le vétiver présente l’intérêt supplémentaire d’être la seule plante pérenne qui ne soit pas irriguée dans le verger mais qui continue cependant à croître durant la saison sèche ; ses chaumes jaunissent dans les zones les plus sèches du champs mais le cœur reste vert, prêt à repousser au moment de la saison des pluies. Dans les zones les plus humides le vétiver ne semble pas souffrir du stress hydrique, ceci même à la fin de la saison sèche lorsque la disponibilité en eau est la plus basse de l’année. Le vétiver semble être un bon révélateur de l’état de la terre et de son humidité.

Cette fabrication quasi-constante de biomasse fournit des chaumes de qualité (les fibres sont très solides) pour la fabrication de toits avec des matériaux nobles et plus isolants que la tôle qui est le plus utilisé dans la zone.

De même, dans une zone semi-aride comme Sébikotane, le paillage des plantes cultivées est une compensation au manque d’eau, aux chaleurs excessives et à la pauvreté du sol. Le paillage permet de conserver la fraîcheur du sol, de capturer l’eau au pied des arbres et à la fois d’enrichir la terre en humus lorsqu’il se décompose. Le vétiver, par sa capacité à fabriquer de la matière organique tout au long de l’année, sans entretien ni arrosage, est la plante par excellence qui peut prétendre à ce rôle.

Le dernier avantage dont jouit le vétiver grâce à sa capacité de croissance continue est son potentiel fourrager. Les limbes anciennes sont indigestes pour les bêtes car trop lignifiés mais les jeunes pousses sont appréciées, notamment par les ânes. Dans un contexte sahélien de surpâturage et d’aridité croissante, où les bergers voient parfois leurs bêtes mourir faute de nourriture à la fin de la saison sèche, le vétiver pourrait être une alternative d’une grande utilité, à l’instar des fourrages habituels (chaumes d’arachide ou de mil) qu’on récolte une fois l’année.

Outre l’application agricole du vétiver, l’ambition des pépinières Naac Baal est de pouvoir fournir des plants pour des projets d’envergure concernant la conservation des sols, la stabilisation d’ouvrages de terre… Elle a déjà œuvré dans ce sens avec la plantation de haies de vétiver sur les talus de ciment de la SOCOCIM (entreprise de fabrication de ciment) de Rufisque, permettant ainsi leur fixation. Ce procédé a pour effet de diminuer la dispersion des poussières de ciment. Cette réalisation est hautement innovante dans le sens où elle a le pouvoir d’offrir des solutions concrètes à certains problèmes de pollution industriel. Le projet en cours actuellement est d’aider à la fixation des berges d’un bassin de rétention à Sébikotane grâce au vétiver.

La prise en compte des problèmes environnementaux au Sénégal est encore balbutiante, ce pays est confronté à de graves problèmes de pollutions (hydrique, industrielles, domestiques…) qui ne sont pas ou peu traités ; le vétiver pourrait jouer un rôle clé dans le traitement de ces pollutions d’origines diverses. L’assainissement des eaux domestiques grâce à ses qualités purificatrices, la dépollution des sites industriels dont les sols sont contaminés…Les applications sont multiples. Le vétiver a un bel avenir devant lui si une promotion assez efficace est réalisée, ses bénéfices peuvent être inestimable pour l’agriculture ainsi que pour l’environnement et les investissements sont vraiment minimes tant en terme d’argent qu’en terme de travail. La pépinière Naac Baal avec quelques autres acteurs au Sénégal sont dans cette démarche pionnière de vulgarisation du vétiver

1 commentaire:

Unknown a dit…

salut Tony, je m appelle Aziz, je vis en Italie depuis quelque temps mais je suis originaire de Sebikotane, qui me manque tellement.

Je trouve tes photos très belles et ton projet hyper intéressant.J admire ton amour désintéresse pour Sebikotane et ta passion pour l écologie.

Je te souhaite plein de succès et je prie vivement pour qu un jour tu puisses uploader des programmes de la Radio communautaire de Sebi Waar wi Fm sur internet. Parles-en a Mama Issa Pouye, il pourra surement t aider.

Ciao et a bientot